Je prenais un verre (à moitié vide) avec un ami qui venait de se faire licencier et qui, dans la foulée, a appris le cancer de sa mère. Il me disait son désarroi, sa détresse face à cet acharnement de la vie. J’ai été très ému par son histoire et j’ai essayé de l’écouter malgré la peur, la tristesse et la colère que provoquaient en moi ce que j’appelais alors, les injustices de la vie.
Quelques années plus tard, autre ami proche, autre verre (à moitié plein celui-ci), lui aussi licencié, m’apprenant au cours de la conversation que sa mère avait un cancer en stade terminal. J’ai tout de suite contacté les mêmes émotions que j’avais contactées des années auparavant, face à la « même situation ».
Alors que j’essayais de le consoler, il me dit sa tristesse et sa joie. Sa tristesse d’apprendre que sa mère n’avait plus beaucoup de temps à vivre mais sa joie que la vie soit bien faite. En effet, ayant été licencié, il avait tout son temps pour accompagner sa mère dans ses derniers moments.
Les deux « mêmes situations » selon mon filtre « factuel ».
Ces deux expériences, anodines, venaient confirmer ou détruire ma croyance: « la vie est injuste ».
En effet, la première expérience venait confirmer ma croyance, je pensais comprendre la personne intime que j’avais en face de moi, et je l’ai juste classée dans la case « Comment est la vie » de ma carte du monde.
La deuxième fois, ça a détruit cette croyance et commencé à construire une autre, « la vie est bien faite » qui venait remplacer l’ancienne dans cette même carte du monde « comment est la vie ».
Or, en y regardant de plus près, je me suis rendu compte de deux similitudes:
- Les deux expériences étaient basées sur l’intimité et la confiance.
- Dans les deux cas, j’ai éprouvé le besoin de caser l’événement dans ma carte du monde et ça m’a coupé de l’authenticité et l’ouverture du moment que j’aurais pu vivre. J’écoutais avec mes oreilles et classais avec ma tête. Je n’entendais que ce qui servait ma carte du monde.
C’est cela une croyance limitante, une croyance qui limite ma capacité à juste être.
Mais croire que la vie est injuste, faisait que je vivais la vie injustement, et je voyais dans tout événement de l’injustice. Quand quelque chose d’agréable m’arrivait, je m’attendais à un retour de baton car la vie est injuste, et ce même mantra justifiait tout ce qui m’arrivait d’inconfortable.
Croire que la vie est bien faite, me permet de jouir pleinement des moments agréables, cependant, provoque de grosses déceptions quand des choses désagréables m’arrivent.
La vie n’est ni juste, ni injuste. Elle n’est ni bien faite, ni mal faite. La vie est telle qu’elle est.
Elle est ce que je décide d’en faire.
Nous, homo sapiens, avons été dominés pendant des centaines de milliers d’années par la nature et vivions dans la peur et la superstition. Depuis quelques milliers d’année, nous dominons la nature, par l’agriculture. Depuis quelques centaines d’années par la science. Et depuis quelques dizaines d’années par la technologie.
Or l’agriculture, la science et la technologie n’apportent pas de réponses existentielles et il y a tellement de choses que nous ne savons pas encore: le futur, les océans, les phénomènes météorologiques, la médecine… Et c’est là où réside notre génie, nous adapter et évoluer.
Le verre n’est ni à moitié vide, ni à moitié plein, il contient une moitié de liquide et une moitié de gaz. Par commodité et pour communiquer avec moi-même et l’autre, et quitte à choisir, je choisis de le voir à moitié plein, en gardant en tête que c’est un verre avec une moitié de visible, une moitié d’invisible.